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02/08/2007

Des joies de l'expatriation, ou le bohneur d'être au Caire

(Ce post est tiré du blog passionnant de Catherine Weibel, journaliste en déplacement depuis plusieurs mois entre la Somalie et le Kenya. Passé le côté "exotique" de la situation, moi, ca me fait carrément flipper) 

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"La soirée était déjà bien avancé et la bouteille de Lambrusco quasiment terminée lorsque ça a sonné. “Tu attends quelqu’un ?” ai-je demandé à mon amie italienne, venue tenter d’améliorer la situation en Somalie via une ONG humanitaire basée à Nairobi. “Ah non, j’attends personne“, me répond-t-elle avant d’aller jeter un oeil dans l’oeilleton de sa porte d’entrée. “Regarde, c’est très bizarre !” me dit-elle d’un air inquiet, se poussant pour me laisser yeuter, à mon tour, ce qui se trouve derrière la porte d’entrée. En l’occurence, il y a là une demi-douzaine de Kenyans costauds qui fixent l’oeilleton d’un air sombre. Tout de suite, début de panique : à en croire le cours “Sécurité sur le terrain au Kenya” que nous avons forcément suivi, c’est ainsi que commence une agression à domicile au pays où les expatriés vivent derrière des fils barbelés. “Ecoute, on va quand même leur demander ce qu’ils veulent”, me dit Francesca, avant de m’indiquer du menton qu’il ne faut pas s’inquiéter : “L’équipe de sécurité de mon employeur a vérifié ma Panic room la semaine dernière, je leur demande ce qu’ils veulent et on file s’enfermer à l’intérieur“.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, et qui sont bien excusables s’ils n’ont jamais vécu en Afrique, une “panic room” est une pièce dotée d’une porte blindée et d’une ligne téléphonique d’urgence, installée dans nombre d’appartements et de maisons à Nairobi* en cas d’attaque à domicile. C’est obligatoire si vous comptez toucher l’assurance après avoir été assassiné chez vous, l’absence d’équipements de sécurités étant jugée comme une faute commise par l’assuré. Par “équipements de sécurité”, on entend un portail grillagé doté d’au moins un garde et de son bouledogue, des murs d’enceinte joliment décorés de fil barbelé et parfois même électrifiés, une porte d’entrée blindée, des fenêtres solidement grillagées, une alarme avec bouton rouge dans chaque pièce et donc, la fameuse “Panic room”, sans oublier un extincteur s’il-vous-plaît (pour éteindre un incendie ou pour assommer l’éventuel agresseur ? Je l’ignore). Inutile de dire que bon nombre de Blancs sont armés et prêts à tirer sur le moindre buisson qui bougerait, ce qui les rend encore plus paranoïaques dans un pays où une arme à feu a plus de valeur que la vie d’un homme, et où on risque de venir vous assassiner à domicile pour dérober l’arme à feu que vous aviez achetée pour éviter d’être assassiné à votre domicile justement… Bref, plus vous êtes riches, plus votre maison est équipée d’équipements de sécurité, et plus vous êtes traumatisés et persuadés qu’on va venir vous assassiner.

Enfin bon, toujours est-il que Francesca demande aux visiteurs ce qu’ils veulent. “Nous sommes de la coampgnie de sécurité et votre alarme a sonné“, qu’ils disent. Bigre, Francesca est persuadée de n’avoir pas déclenché l’alarme par erreur et le manuel de sécurité appelle à se méfier des soi-disants gardes de sécurité, paraît que ce serait facile pour un voleur de dérober un uniforme, voire de le louer. Ne dit-on pas que les bandes armées, qui débarquent à la douzaine lourdement armées pour vous piller et vous violer, louent leurs armes auprès de policiers soucieux d’arrondir leurs fins de mois ? Enfin bon, on se raisonne, après tout Francesca vit dans un complexe de cent appartements avec deux gardes à l’entrée, donc la probabilité que des bandits aient choisi sa porte est faible. Nous renonçons donc à nous enfermer dans la Panic Room et à appeler la police diplomatique, et passons tout simplement un coup de fil à la compagnie de sécurité qui gère l’alarme. Laquelle confirme qu’une alarme a bien sonné et qu’elle a bien envoyé ses employés.

Nous finissons donc par ouvrir la porte, ou plutôt les deux portes : la porte normale, comme en France, et la porte à lourde grille de fer et verrou, comme à Nairobi. On assure aux gardes que notre alarme n’a pas sonné. Leur chef fait donc un constat de fausse alerte après avoir vérifié, en faisant le tour des pièces, que nous ne mentons pas sous la pression d’une arme. Il appelle son QG : ”Fausse alerte pour l’appartement 402 je répète, fausse alerte à l’appartement 402“. Francesca s’étonne : “Euh… ici c’est l’appartement 302“. Le chef est incrédule : “Comment ça, ce n’est pas le 402 ?“. Francesca insiste : “Ben non, ici c’est le troisième étage, le 402 c’est au-dessus“. Le chef resouffle dans son talkie-walkie : “Attention, rectification, attaque dans un autre appartement, nous montons“.

On a espéré qu’il s’agissait d’une fausse alerte.

* Pour les anglophones, le doux surnom de Nairobi est Nairobberry (robbery = vol avec violence)"

Commentaires

J'espère que tu vas me ramener un savon d'Alep et une soie de Damas en guide de droits d'auteur !!!!!!!

Écrit par : catherine | 14/08/2007

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